Big bang social chez Eiffage

Article paru dans l’Humanité  le 27 Février 2013.

 

Après le jugement du 1er février mettant fin à l’unité économique et sociale (UES) 
regroupant ses 56 filiales, Eiffage énergie fait voler en éclats la représentation du personnel.

 

Un « coup d’État » sur les institutions représentatives du personnel (IRP), c’est ce que dénoncent les syndicats CGT, CFDT et CGC de la branche énergie du groupe Eiffage, après le jugement rendu le 1er février par le tribunal d’instance de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). En 1993, la justice avait reconnu l’unité économique et sociale (UES) entre la maison mère et les 56 filiales de la branche regroupant 14 000 salariés, ce qui avait permis la mise en place d’un comité central d’entreprise (CCE) et de délégués syndicaux centraux. Saisi par un syndicat CGT local dissident et par un syndicat SUD non représentatif, vraisemblablement soutenus par la direction, le tribunal vient au contraire d’estimer que les critères d’une UES n’étaient plus remplis, et d’y mettre fin.

 

Non contente de remettre en cause le CCE et les délégués centraux, Eiffage énergie en a profité pour remettre à plat l’ensemble des mandats de délégués (DS, DP, CE, CHSCT), soit près de 900 au total dans la branche. « La direction veut tout démanteler et tout faire éclater, dénonce Gilles Letort, secrétaire du CCE d’Eiffage énergie. À la place du CCE actuel, il y aurait un CCE dans chaque filiale, mais sans aucun moyen de coordination qui nous permettait d’avoir une efficacité et une vue d’ensemble de la politique de la branche. Au niveau local, elle réorganise les structures par métiers, en mettant en place le plus souvent possible des délégations uniques du personnel regroupant DP et CE. » Alors que le CCE permettait un contrôle économique central et disposait d’un droit à l’information consultation au niveau national, sa disparition risque de faciliter les restructurations ni vu ni connu. « Sur les deux dernières années, on a déjà perdu 1 700 emplois et on craint une accélération puisque la branche énergie est à la traîne en matière de rentabilité dans le groupe et par rapport aux concurrents », souligne le cégétiste. La fin de l’UES menace également les activités sociales et culturelles du CCE et la mutuelle d’entreprise, vieille de cent ans et originale puisque les retraités en bénéficient.

 

Alors que le tribunal a statué en dernier ressort, c’est-à-dire sans possibilité d’appel, la CGT, la CFDT et la CGC s’appuient sur une jurisprudence de la Cour de cassation de janvier 2012 pour faire appel tout de même, et ont saisi la justice en référé pour faire suspendre la remise à plat des IRP lancée par la direction. Ils appellent ce matin les salariés à des rassemblements en région et devant le siège d’Eiffage énergie à Saint-Denis.

 

Fanny Doumayrou

 

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